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20 décembre 2010 1 20 /12 /décembre /2010 16:12

 

Un article intéressant de la RTBF qui vient en complément d'une question que je me suis posée récemment, à savoir existe-t-il encore une justice en Belgique. Question tout à fait légitime quand on voit le résultat de nombreux procès médiatisés de ces derniers temps, pratiquement tous étant entachés d'une manière ou d'une autre par d'honteuses décisions portant plus sur la forme des affaires que sur leur fond.

 

L'article en question concerne la publication d'un baromètre de confiance publié par le Conseil Supérieur de la Justice, et qui, par sondage, tente d'évaluer le point de vue du citoyen sur la Justice. Il apparaît que 60% des sondés disent avoir confiance en la justice, ce qui est à comparer avec la confiance accordée à l'enseignement (94%) et à la police (85%). Selon cet organisme, 60% serait un « bon niveau de confiance » de la part du citoyen. Personnellement, j'ai quelques doutes là-dessus, d'autant plus que ce taux de confiance diminue (il était de 66% il y a 3 ans), ce qui n'est pas étonnant au vu des derniers gros procès traités ces derniers mois. 60% de confiance peut paraître remarquable dans l'absolu, mais il faut se rappeler que l'on parle ici de la justice, probablement le pilier central de toute démocratie.

 

Ce que je note par exemple, c'est l'exceptionnelle confiance accordée à la police, qui elle est en hausse permanente depuis 2002. Ce qui me fait dire que le fossé se creuse, dans l'esprit des gens, entre les hommes de terrains qui sont sur le front et ceux « de l'arrière ». Et en effet, dans les diverses affaires que j'ai déjà abordées, on constate à chaque fois un remarquable travail de longue haleine de la part des policiers, travail immanquablement gâché par des procédures bureaucratiques. D'où une frustration bien compréhensible de la part de ces mêmes hommes de terrain qui ont parfois l'impression que l'on sabote leur boulot. J'appelle ça le triomphe de la bureaucratie sur la raison, où l'on a tendance à oublier qu'à la base l'administration est sensée servir dans un but pratique, et son application se doit justement d'être conditionnée en fonction de l'évolution des moyens disponibles et du but à atteindre. Et non l'inverse.

 

Ce que souligne le CSJ, c'est qu'un des gros points noirs de la justice belge est le temps incroyablement long des procédures, ce qui est dû bien souvent à un manque de moyen, qu'il s'agisse du nombre de magistrat ou des tribunaux vieillissants parfois mal adaptés (je pense entre autres au palais de justice de Bruxelles, magnifique bâtiments actuellement en restauration, et qui en pratique est une vraie passoire...). Il faut savoir qu'en Belgique, la plupart des peines de prisons de moins de trois ans ne sont pas affectées, simplement par manque de place dans les prisons. Il est clair qu'une personne condamnée et pourtant remise en liberté immédiatement génère un sentiment d'impunité... et encore une fois, un sentiment d'abandon ressenti par les policiers, dont le travail se retrouve de la sorte pratiquement nié.

 

On constate également de manière assez alarmante, la persistance d'une idée selon laquelle il y aurait une justice de classe, l'issue d'un procès étant conditionné pour 45% des belges au milieu social de la personne jugée. Là, c'est peut-être aller un peu loin. Ceci dit, on ne peut nier le fait qu'un avocat aux honoraires élevés est en général plus efficace qu'un commis d'office. Ceci dit, il ne s'agit pas là du fonctionnement de la justice en elle-même. Une autre explication serait que des individus issus de classes défavorisées sont plus souvent impliqués dans des affaires criminelles. S'il s'avère que c'est le cas, ça pourrait expliquer l'idée d'une justice « sociale. Mais il est difficile de se faire une idée précise là-dessus, les statistiques sur le sujet étant souvent mal vues, pour ne pas dire taboues. Qui plus est, il faudrait catégoriser les crimes: si on peut supposer qu'une personne pauvre sera plus facilement impliquées dans une affaire de vol, il n'en va pas de même des affaires de viol ou de corruption. Bref, difficile de trancher sur ce point, aussi je ne m'y risquerai pas.

 

A noter que pour temporiser ces chiffres qui peuvent être vus (à juste titre!) comme décevants, le CSJ les compare aux cotes de confiance par rapport à la presse (51%) et en l'Eglise (36%), et se réjouit de les battre à plate couture. Mais j'espère bien qu'elle les bat, encore heureux! Le contraire serait plus qu'inquiétant alors que la justice Joue un rôle central dans la société, plus important encore que celui de la presse! Et si la cote de l'Eglise est aussi basse, c'est en grande partie à cause du scandale des prêtres pédophiles en Belgique. Car avant cela, elle atteignait la note respectable de 54%, ce qui n'est plus si loin de celle de la Justice. Dernière comparaison, la confiance accordée au Parlement: 53%. Mais là encore, c'est à mettre en relation avec l'actualité: la Belgique est en crise politique grave depuis 6 mois (nous avons voté en juin mais n'avons toujours pas de gouvernement). Car avant cela, la confiance accordée au parlement étant de 77%, battant largement la Justice!

 

Bref, des chiffres bien plus révélateurs que ne veut bien l'admettre le Conseil, et en tout cas il n'y a pas vraiment de quoi se réjouir!

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