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8 janvier 2011 6 08 /01 /janvier /2011 21:05

 

Alors que le pays sombre dans la crise, son principal instigateur, monsieur De Wever, le chef de file des nationalistes flamands, parade sur le plateau de la VRT (première chaine publique flamande) dans le cadre d'un jeu populaire, nommé « De Allerslimste mens ter wereld », traduisez « l'homme le plus intelligent du monde ».

 

Pour ça, il a bien le temps, lui qui est le premier à rappeler qu'en 2007 madame Milquet, engagée comme lui dans les négociations pré-gouvernementales, avaient dû mettre fin à une réunion sous prétexte de se rendre au chevet de sa fille, malade. Un prétexte somme toute moins important que celui qui consiste à se pavaner sur une chaine de télévision.

 

Par delà le surréalisme de la situation, habituel en Belgique et également chez monsieur De Wever, soulignons le coté populiste du gaillard. En passant à la télévision, il se montre « proche » de ce que pourrait être le citoyen ordinaire, ce qui le rendrait presque sympathique. Et si en plus il y brille sur des questions de culture générale, alors il fait d'une pierre deux coups: non seulement il se montre, mais en plus il paraît intelligent.

 

Car intelligent, il l'est, et il l'a prouvé bien autrement qu'en s'étalant ainsi à la télévision. Par exemple, en appliquant une stratégie de blocage, pour « prouver » que la Belgique est devenue ingouvernable, et doit par là même cesser d'exister, chaque région devant selon lui s'assumer indépendamment des autres. Et ça marche, du moins ça marchait jusqu'à récemment, la N-VA devenant de plus en plus incontournable à chaque nouveau sondage. Cependant, je me demande si cette fois il n'est pas allé trop loin, vu les réactions épidermiques de la presse flamande au récent rejet par De Wever de la proposition de compromis de monsieur Vande Lanotte. Je suis curieux de voir les prochains sondages d'opinion à paraître dans les prochains jours... car parallèlement à ça, 42% des Flamands sont aujourd'hui convaincus que monsieur De Wever ne manifeste aucune bonne volonté dans les négociations actuelles. Si l'on ajoute à cela les indécis, ça peut faire beaucoup...

 

Mais pour en revenir à l'exposition de monsieur De Wever alors que le pays est en pleine crise (même si l'émission a été enregistrée il y a quelques jours, ça ne change rien sur le fond), il est à noter qu'elle ne passe pas inaperçue. Ainsi, comme relayé sur le site de la RTBF, le Washington Post (excusez-du peu!) s'en est rendu compte presque avec indignation, et ce alors que divers organismes financiers notamment américains soulignent depuis quelques temps qu'il est l'heure pour la Belgique de conclure sa crise politique, sous peine voir son indice de confiance diminuer, ce qui en ferait une cible facile pour les spéculateurs.

 

Le Washington Post donc n'est pas tendre avec l'ami Bart décrit comme étant « nonchalant » et « féru de citations latines ». A noter que ces citations sont en général choquantes, et servent encore une fois à le faire passer pour cultivé. Lui qui a une conception de l'histoire bien particulière pour un historien de formation... A noter que monsieur De Wever justifie sa participation à cette émission par un savoureux « je n'avais rien de mieux à faire... » repris encore une fois pas le Post indigné par une telle attitude. Mais ça, on s'en doutait déjà, vu qu'il n'a jusqu'à présent rien proposé d'autre que l'application stricte de son programme de campagne dans les négociations actuelles, lesquelles durent, rappelons-le, depuis 209 jours.

 

Voilà donc le bulldozer flamand chargé soit-disant de réformer le pays. Avec une conception bien à lui de ce qu'est une réforme de l'état, une négociation post-électorale ou un compromis gouvernemental. Un bulldozer manipulateur, provocateur, et populiste, qui aujourd'hui met véritablement en péril l'ensemble d'une nation dont il s'acharne à nier la réalité.

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6 janvier 2011 4 06 /01 /janvier /2011 14:21

 

Au lendemain de l'accueil mitigé de la dernière note de compromis présentée par le conciliateur royal, voici, rapportées sur le site de la RTBF, un extrait des principales réactions de la presse du nord comme du sud du pays. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle n'est pas tendre, alors que l'on savait très bien que l'on ne pouvait en aucun cas se permettre de ne pas conclure d'accord pré-gouvernemental. Et pourtant, ils ont osé: le CD&V et la N-VA ont refusé la note, alors que celle-ci était déjà, de l'avis unanime, « très flamande ».

 

Pris sur le site de la RTBF.

 

« Au lendemain de l'accueil mitigé du CD&V et de la N-VA à la note Vande Lanotte - alors que les cinq autres partis ont dit leur volonté de continuer les négociations - la presse, tant du nord que du sud du pays juge sévèrement les deux partis de l'ancien cartel CD&V/N-VA.

La Dernière Heure publie deux pages blanches, assorties d'un commentaire. "Ces pages sont blanches, écrit Stéphane Tassin, parce qu'elles témoignent d'un ras-le-bol total. L'interminable cirque continue. Face à l'incapacité des négociateurs à conclure un accord au bout de 207 jours. Face à ces petites phrases stériles, face aux réunions secrètes, face à cette confiance manifestement brisée, face à ce gâchis monumental, nous avons jugé qu'il n'y avait plus rien à dire", écrit encore Stéphane Tassin.

Et le ton est donné, celui d'une lassitude partagée par toute la presse, avec des nuances toutefois. Le Soir constate : "CD&V et N-VA ont osé: ils ont dit neen". Car le constat est unanime : "ce non mais, neen maar, est de fait un non tout court". Njet, nichevo, nada. "Alors, le chaos à nouveau ?", se demande Béatrice Delvaux. Qui s'emporte : "on se moque des francophones là, non ? La Flandre voulait une grande réforme de l'Etat, elle l'a". Même en Flandre, on le dit, poursuit en substance la rédactrice en chef du Soir. "Rappelons qu'on demandait aux sept partis de se remettre à table pour négocier, amender, moduler le texte proposé. Ne pas dire oui à ce stade, avec ce qui est sur la table est tout simplement, excusez le terme, minable. Et gravement irresponsable."

Côté francophone, on pointe donc clairement du doigt les flamands, responsables de cette crise. C'est le sens de l'éditorial de Pierre-Francois Lovens, dans la Libre Belgique. "Surenchère flamande", écrit-il. "Avant même de connaître le sort de la note du conciliateur royal, il serait peut-être bon de rappeler à messieurs Beke et De Wever que leur surenchère n'est pas acceptable. La note apporte tous les éléments pour une importante réforme de l'état. Elle fixe un cadre, un périmètre qu'il convient de respecter sans pinailler. Chaque négociateur devrait agir avec sincérité. La N-VA et le CD&V font exactement l'inverse : ils chipotent et divisent", conclut Pierre-Francois Lovens.

Dans les quotidiens du groupe Sud Presse, Benoit Jaquemart exprime aussi sa lassitude : "Passons à autre chose, on a tout essayé avec la N-VA, mais le constat est là, c'est un échec. Négocier avec De Wever, acceptez mes demandes et puis c'est tout. Si la NVa veut des élections, si le CD&V parie sur un scrutin pour se refaire une santé, qu'il le dise. Au moins, les choses seraient claires. Mais de grâce, arrêtons ce jeu, c'est indigne", conclut le commentateur.

 

Un ton pas plus modéré dans la presse flamande

En tous cas dans trois quotidiens, le Laatste Nieuws, le Morgen et le Nieuwsblad. Luc Vanderkelen, dans Het Laatste Nieuws, sort l'artillerie. En visant tout particulièrement le CD&V, "ce parti à l'orgeuil blessé, écrit-il, un parti qui n'accepte toujours pas de ne plus être le numéro un, et qui se noie dans ses rivalités internes. Mais de toute manière, explique encore le commentateur, quelle viabilité aurait une coaltion si, de prime abord, ses partenaires ne sont même pas prêts à se remettre autour de la table. Le jour des innocents est passé, et il ne reste qu'une solution: que les marchés financiers tancent vertement la Belgique. On aura alors vraiment des raisons de pleurer, mais on finirait presque par l'espérer", constate Luc Vanderkelen. Qui au passage s'en prend au patron de la N-VA : "Tiens, toute la journée, hier, on a vainement attendu un commentaire de sa part. Il a fallu attendre le soir, et l'émission de slimste mens sur la VRT, pour voir enfin Bart De Wever. Absurde, alors que le pays est au bord du gouffre. On ne peut imaginer meilleur exemple du côté 'Titanic' de Bart de Wever".

"C'est sans espoir, écrit Yves De Smet dans le Morgen. Il n'y a qu'au pays du surréalisme qu'on peut briser une négocation sur, par exemple, les compétences en matière d'entrées et de sorties sur le ring de Bruxelles. L'inaptitude du CD&V et de la N-VA à aller au compromis rend la situation désepérée et, surtout, très grave."

Seuls le Standaard, le Belang Van Limburg et la Gazet Van Antwerpen, proches du CD&V et de la N-VA, pointent du doigt les francophones, tandis que dans le Nieuwsblad, Liesbeth Van Impe n'a qu'un mot : "C'est à hurler."

 

Didier Delafontaine. »

 

Fin de citation.



Petites clarifications pour bien comprendre, surtout adressée à d'éventuels lecteurs français. Le CD&V, parti flamand de centre-droit aux opinions théoriquement modérées, s'est allié en 2004 avec la N-VA, parti ultra-nationaliste flamand dont le premier principe inscrit au programme est « l'établissement d'une république de Flandre intégrée à l'Europe ». Inutile de préciser que ce dernier est également muni d'un programme socio-économique proche de l'extrême-droite, notamment sur les questions liées à l'emploi et à l'immigration. A coup de stéréotypes et de propos chocs, ce dernier parti a réussi a prendre l'ascendant sur son partenaire à l'issu de l'échec des négociations consécutives aux élections fédérales de juin 2007. A l'époque, le grand vainqueur était Yves Leterme, leader du CD&V, « monsieur 800 000 voix » comme on l'appelait alors, tandis que la NV-A ne devait son apparition sur le devant de la scène qu'à son alliance avec les chrétiens démocrates flamands. Malheureusement, suite à l'enlisement des négociations, une partie de l'électorat flamand, convaincu que l'on ne pouvait plus faire grand chose, s'est laissé séduire par le radicalisme de la N-VA. Lors des nouvelles élections ayant suivi la chute du gouvernement au printemps de l'année dernière, la N-VA, désormais suffisamment forte pour se détacher du CD&V, a remporté la mise, son président Bart De Wever obtenant à son tour plus de 800 000 voix. Ce qui fait figure de plébiscite sachant que les élections belges se font à la proportionnelle, et non à la majorité, et que la population flamande s'élève à environ 6 000 000 d'habitants. Son parti a quant à lui fait un score de près de 30% en Flandre. Inquiétant sachant que, rappelons-le, il s'agit d'un parti séparatiste. Fort de ce score le rendant incontournable, le parti s'est empressé de faire de multiples revendications allant dans le sens d'une plus grande autonomie pour la Flandre, que ce soit au niveau de l'emploi ou de la justice. Les francophones ont accepté beaucoup de choses, mais ce n'était jamais assez pour monsieur De Wever qui a systématiquement rejeté tous les pré-accords qui lui étaient proposés. Résultat des courses: cela fait 207 jours aujourd'hui que le pays se trouve avec un gouvernement « en affaires courantes », c'est à dire aux pouvoirs réduits, à l'heure où l'on doit faire face à une crise économique à l'échelle mondiale qui est loin d'être réglée.


Plusieurs personnalités ont été chargées par le Roi chacune à leur tour de mener des négociations en vue de la formation d'un gouvernement. Ces négociations ont à chaque fois échoué, et la dernière personne à avoir été chargée d'une mission par le Roi était Johan Vande Lanotte, figure de proue du socialisme flamand. C'était il y a deux mois. Il y a quelque jours, monsieur Vande Lanotte remettait sa fameuse note. Laquelle vient d'être rejetée par les deux partis déjà nommés. Si la N-VA la rejette par idéologie, il n'en va pas de même du CD&V qui cherche lui à reprendre à la N-VA une partie de ses électeurs qui ont fait le voyage inverse aux dernières élections. C'est de là que vient le commentaire « un parti à l'orgueil blessé » venant du journal Het Laatste Nieuws ».


Or, ce rejet était impossible: on doit trouver un accord, quel qu'en soit le prix! Diverses instances financières l'ont rappelé au mois de décembre: la situation économique belge est excellente, mais son instabilité politique en fait une cible de choix pour les spéculateurs. Et en effet, à peine l'annonce de l'échec était-elle faite que le taux d'intérêt sur l'emprunt pour la Belgique commençait déjà à remonter!


De plus, en l'absence de résultat, la seule « solution » est le retour aux urnes. Un nouveau vote est tout simplement inenvisageable, et personne n'en veut. Ni le contribuable qui commence tout doucement à se lasser, ni la presse, ni les partenaires sociaux, à savoir les syndicats et les patrons belges. Car tout le monde sait que de nouvelles élections ne résoudraient rien du tout. Le seul résultat serait encore une progression des nationalistes flamands, pour la simple et bonne raison que ce qu'ils disent depuis des années est en passe de se produire: la Belgique devient ingouvernable, ce qui a le dont d'exaspérer une partie de la population flamande, laquelle ne se rend manifestement pas compte que si le pays devient à ce point ingouvernable, c'est de la faute de la N-VA qui bloque tout depuis des mois.

C'est un petit peu comme aux Etats-Unis, lorsque les électeurs sanctionnent les Démocrates en votant pour les Républicains, alors que ceux-ci sont directement responsable de l'inefficacité du gouvernement. Mais si la tactique du blocage est aussi souvent employée, c'est parce qu'elle marche, et De Wever le sait.


Pourtant, la note a de quoi plaire aux Flamands, et est déjà inacceptable pour un francophone: elle prévoit la scission de la justice, du code de la route et d'une partie de l'impôt sur les personnes physiques en plus de ce qui était déjà réclamé par les nationalistes flamands à l'issu des élection, à savoir une régionalisation de la politique liée à l'emploi ainsi qu'à la sécurité sociale. Soit un transfert de compétences du fédéral vers les entités fédérées qui oscille entre 20 et 25 milliards d'euros, alors que l'on parlait encore cet été de « seulement » 13 milliards. Et ce, sans aucune compensation significative pour les francophones: autrement dit, on se trouve là face à une Flandre qui dicte sa loi, et n'en a pas encore assez, alors même que les francophones pour éviter le blocage ont accepté bien plus que tout ce qu'ils étaient jusque-là près à concéder. Et ça ne suffit pas pour l'Ogre De Wever.


Si je n'étais pas inquiet lors des élections, je commence sérieusement à le devenir. Car on touche là au fond de l'absurde: des partis n'hésitent pas à sacrifier l'intérêt de l'ensemble de la population, aussi bien francophone que flamande, par pure démagogie et en prétendant agir pour le bien de cette dernière. L'heure est grave, et on va le payer cher. Une épée de Damoclès est suspendue au dessus de nos têtes: en l'absence d'un gouvernement stable dans les six mois, la notation économique de la Belgique va être sérieusement revue à la baisse. Et là, tout le monde y perdra.

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28 décembre 2010 2 28 /12 /décembre /2010 20:05

 

Lors de la crise bancaire de 2008, la Belgique avait été comme d'autres pays durement touchée. Plusieurs banques étaient en effet directement concernées par des actifs « pourris », ce qui a poussé le gouvernement à prendre des mesures fortes pour sauver l'ensemble du système bancaire belge. On peut par exemple citer la vente de Fortis à BNP Parisbas, laquelle avait entraîné la chute du gouvernement Leterme, les conditions de vente ayant été fortement avantageuses pour BNP qui entre temps est devenue la plus grande banque du monde. Il est à noter que c'est à cette occasion qu'a pu émerger un homme peu recommandable en la personne de Mischaël Modrikamen qui n'était autre que l'avocat des petits actionnaires dans cette affaire. Comme quoi, on s'en serait bien passé...

 

Mais le sujet du jour concerne une autre banque, Dexia, laquelle est la 16ème plus grande entreprise mondiale en terme de capital. Sévèrement touchée elle aussi par la crise, elle a dû demander l'aide de l'état belge. Ses dirigeants ont au passage pris leurs responsabilités et se sont retirés. Parmi eux, Axel Miller, dont il sera question aujourd'hui. En effet, monsieur Miller est revenu dans une longue interview sur la crise, et rétrospectivement ce que l'on peut en dire actuellement. Il est intéressant de noter que monsieur Miller, en tant qu'ancien dirigeant de la deuxième banque mondiale, est bien placé pour parler du système financier, vu qu'il en a été l'un des acteurs majeurs. Et il est d'autant plus intéressant de constater que, loin d'être un salopard visant le profit avant tout, monsieur Miller a toujours été parmi ceux qui tentaient de limiter le « capitalisme sauvage » et le libéralisme extrême, car il faisait partie de ses acteurs qui en connaissaient les limites. Sa mise à l'écart tient justement au fait qu'il avait prévenu depuis longtemps ce qui risquait d'arriver. Son seul tort aura été finalement d'avoir eu raison.

 

Axel Miller souligne à juste titre le fait que la crise de 2008 résulte de la conjugaison d'un ensemble de facteurs qui étaient somme toutes assez prévisibles. Pour faire bref, la crise des crédits du logement aux Etats-Unis s'inscrit dans un problème plus global, à savoir le fait que pratiquement l'ensemble de la croissance de ces 40 dernières années s'est faite à crédit. Tout le monde est convaincu que c'est du solide et que l'on peut aller de l'avant, jusqu'au jour où on arrive plus à payer la facture. Là on se rend compte d'un coup que toute la construction n'est qu'un château de cartes, menaçant de s'effondrer au moindre coup de vent. Le système bancaire, bâti sur un ensemble de prêts, n'en est que plus artificiel, et l'on s'en rend compte le jour où la réalité nous rattrape. Si l'on ajoute à cela la spéculation à outrance sur les grandes places boursières, avec toute une série d'acteurs financiers placés en embuscade pour s'en mettre plein les poches au bon moment, on comprend qu'il suffise d'une petite poussière dans la belle mécanique pour en révéler la fragilité. L'absence totale de contrôle des gouvernements sur les pratiques financières, autrement dit le libéralisme extrême totalement dépourvu de limite et encore plus de morale, a montré là toute sa dangerosité. Miller souligne également là le danger des marchés qui dictent leurs lois. Mais comme il le rappelle lui-même, le marché, ce n'est pas un ensemble uni prenant des décisions communes à l'insu de tous (ce qui fait pas mal théorie du complot quand on y pense) telle une sorte de gouvernement mondial agissant dans l'ombre, mais bien d'un groupe d'acteurs financiers qui agissent à l'instinct, sans aucune concertation, et dont les seuls points communs sont finalement l'immoralité et l'individualisme justement. En somme, les places boursières, loin d'être de belles entités bien organisées et hiérarchisées, ne sont rien d'autre que l'application concrète des principes anarchiques à l'économie capitaliste. A ce titre, Miller n'hésite pas à dire que l'on est arrivé au bout d'un système. C'est d'autant plus marquant que, rappelons-le, Miller est encore aujourd'hui un acteur de ce marché. En gros, il n'hésite pas par honnêteté à scier la branche sur laquelle il est assis, ce qui n'est pas banal.

 

Il revient ensuite sur la crise grecque, l'un des évènements économiques de cette année 2010. Là encore, il reconnaît que l'économie et le financier ont échoué. Selon lui, il faudrait maintenant une meilleure concertation à l'échelle européenne, permettant une intervention forte quand c'est nécessaire. Autrement dit, un discours tout à fait à l'opposé du libéralisme prônant la totale liberté des marchés. Ce leadership doit être capable d'imposer sur le long terme un changement des mentalités passant par une plus grande responsabilisation, et ce à tous les niveaux. Il est bien entendu conscient que « cela va générer de l'incompréhension, de la colère et des tensions sociales. ». Il incite également à éviter de penser d'une manière manichéenne: s'il est clair que le surendettement a montré ses limites, l'autre extrême qui serait de mettre en avant l'austérité à outrance est tout aussi néfaste: on l'a bien vu en Grèce, mais aussi en Espagne et en Irlande, où non seulement cette austérité mécontente tout le monde (ce qui était prévisible), mais ne rassure pas pour autant les marchés... ce qui in fine n'améliore pas la situation. En gros, si la réduction est déficits devra bien se faire un jour, ça ne doit pas passer par une paralysie totale des investissements des états ce qui à terme doublerait l'austérité par une véritable stagnation économique, laquelle nous paralyserait durablement. Sur ce point, il rejoint parfaitement le discours de Krugman.

 

Miller revient également sur l'actualité sociale de ces deux dernières années en Belgique, en particulier les restructurations/faillites de la Brink's, de Carrefour et d'Opel Anvers. Ces trois situations sont différentes: dans le cadre de la Brink's (société américaine de transport de fond) il s'avère qu'elle n'était pas rentable. La direction américaine a en conséquent voulu aligner le statu des employés sur celui des ouvriers, ce qui est illégal en Belgique. Conclusion, elle a mis la clé sous la porte. Carrefour Belgium correspond elle à une mauvaise étude du marché belge lors du rachat par Carrefour du groupe GB il y a une dizaine d'année, alors que ce dernier était leader de la grande distribution en Belgique. Des produits et une politique inadaptés aux besoins de la clientèle belge rendant l'ensemble moins rentable que d'autres groupes, tel Delhaize ou Colruyt, la direction française a dû annoncer une restructuration qui à la base aurait dû coûter 1700 emplois directs. Enfin, Opel Anvers, usine générant près de 10 000 emplois directs et indirects (via la sous-traitance) est l'exemple même d'une filiale sacrifiée au nom d'un intérêt national. En effet, Opel (elle-même appartenant à General Motors), victime de la crise, a dû faire des économies au niveau mondiale, et a préféré préserver l'emploi en Allemagne, quitte à se séparer de sa principale usine belge, alors que celle-ci était unanimement reconnue comme la plus rentable de l'ensemble du groupe! La raison pour laquelle Miller parle de ces trois affaires qui n'ont apparemment pas grand chose en commun, est que dans les trois cas, la direction s'est trouvée éloignée du « front ». C'est à dire que ces firmes, localisées en Belgique, sont dirigées depuis les Etats-Unis, la France et l'Allemagne. Et cela a eu d'autant plus d'impact que, dit-il, la Belgique « a témoigné en Belgique d'une énorme naïveté en n'ayant pas de politique industrielle qui vise à conserver des centres de décision dans notre pays. Et on le paie ».

 

Miller se demande à travers ces trois cas si il est réellement impossible de concilier les intérêts des actionnaires et des employés. Selon lui, il est tout à fait possible de passer par une médiane, et c'est même nécessaire dans la mesure où un patron a des comptes à rendre aux deux. Ce qu'il s'est toujours efforcé de faire. Je me souviens d'une image marquante lorsqu'il a démissionné de son poste de chez Dexia: celle de ses employés qui l'attendaient à la sortie en ayant les larmes aux yeux de voir partir celui qui avait été pour eux un excellent chef. Selon lui, une entreprise, pour tourner correctement, doit évidemment faire du profit, mais cela ne doit pas entraîner le sacrifice de ses travailleurs... pour la simple et bonne raison qu'elle dépend de ces mêmes travailleurs. D'où l'absolue nécessite d'une synthèse entre les deux. Car comme il le dit, actionnaires et travailleurs sont dans le même bateau, il serait donc anormal que l'un paie pour l'autre.

 

Miller passe ensuite au sujet « crise politique ». Je ne vais pas trop en parler ici pour la simple et bonne raison qu'il faudrait l'expliquer pour pouvoir la comprendre, ce qui est assez long. J'avais envisagé à une époque une série d'articles là-dessus, mais je suis passé à autre chose depuis. Je la poursuivrai sans doute un jour, mais tant que ce n'est pas effectif, difficile de commenter...

 

Le dernier point important est l'affirmation de Miller selon laquelle -mais ce n'est pas une surprise- rien n'a réellement changé depuis 2008. On le constate en effet tous les jours: ce sont encore aujourd'hui les marchés qui dictent leurs lois sans aucune limite et les banques d'investissements (toujours aussi « artificiels ») qui restent « maîtres du jeu ».

 

Bref, ce que l'on peut tirer de tout ça, est que, une fois n'est pas coutume, nous avons là un grand acteur du monde financier qui tient un discours réaliste et assume pleinement ses responsabilités, ce qui n'est pas du luxe.

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23 décembre 2010 4 23 /12 /décembre /2010 18:54

 

Un petit article aujourd'hui, simplement pour commenter les résultats d'un sondage réalisé par le CRIOC, sondage concernant la popularité en Belgique des fêtes de fin d'années.

 

Et cette popularité est en baisse justement, et pas qu'un peu. En effet selon l'enquête, seuls 66% des sondés fêtent noël cette année, alors qu'ils étaient encore 88% il y a trois ans. Même baisse concernant le nouvel an, où on passe là de 72 à 64%. On constate également que 45% des personnes « n'ayant rien reçu pour les fêtes » viennent de Bruxelles (rappelons que la région de Bruxelles comprend environ 10% de la population du pays).

 

Ce que l'on peut se demander, c'est le pourquoi de cette diminution. Je pense qu'il y a plusieurs facteurs qui jouent. D'une part une certaine lassitude face à l'instrumentalisation commerciale de ce moment convivial. Bien sûr, ça a toujours été le cas, mais l'on a de plus en plus l'impression que d'année en année, les campagnes publicitaires concernant les fêtes de fin d'année débutent de plus en plus tôt. Deuxièmement, on peut avancer la crise. Ceci dit, la période des fêtes est justement l'occasion d'oublier temporairement les difficultés de la vie quotidienne, et je doute donc que celle-ci joue réellement un rôle à ce niveau. Je comprendrais qu'elle influe le montant total des achats de noël, les gens ayant globalement moins d'argent à dépenser, mais de là à ne plus rien fêter du tout...

 

Je pense à une troisième cause. Et ce qui me mène à cela, c'est la constatation de la très nette différence entre la diminution concernant noël (22% tout de même) et celle concernant le nouvel an (à peine 8%). Noël est une fête à la base catholique. Or il se trouve que le catholicisme recule. Et je ne parle pas ici de catholicisme en tant que croyance religieuse, mais plutôt de son coté culturel, qui est pratiquement omniprésent dans nos sociétés d'Europe occidentale.. Il est fort probable que les révélations de cette année concernant le scandale des prêtres pédophiles ait poussé certaines personnes vers une réaction extrême passant par le boycott total de tout ce qui se rapproche de près ou de loin à l'Eglise catholique. Il est à noter entre parenthèses que le nombre d'apostasies (débaptisation) a quadruplé en 1 ans, ce qui dénote effectivement d'une tentative de rupture de certains par rapport à l'Eglise, voire à la religion.

 

Pratiquement dans la même veine, on peut également noter le fait que la population musulmane augmente très rapidement, ce qui se traduit par un recul de la proportion de catholiques dans la société. Or, les musulmans ne fêtent pas noël. Pour l'anecdote, j'ai justement eu tantôt une conversation intéressante avec un ami musulman, où je lui demandais pourquoi les musulmans ne fêtent pas noël, alors qu'ils vénèrent Jésus en tant que premier des prophètes. Il m'a répondu simplement que ce qui était vénéré, c'était la révélation de la parole de Dieu par Jésus, mais non sa vie en lui-même, ceci expliquant cela. Ce qui vient à l'appui de la thèse selon laquelle la diminution d'enthousiasme pour les fêtes serait à rapprocher (pour partie) à l'augmentation du nombre de musulmans, est le fait que 45% des personnes « ne recevant pas de cadeaux » proviennent de Bruxelles... Qui compte 30% de musulmans.

 

A noter que, si l'enthousiasme de certains diminue pour diverses raisons, les actions d'autres sont là pour compenser. Ainsi on a cette année battu en Belgique deux records; celui de la plus longue buche de noël (370 mètres toute de même!), ainsi que celui du sapin comptant le plus d'ampoules allumées simultanément (près de 200 000!). Les bénéfices récoltés lors de ces évènements ont été reversés à diverses associations caritative, entre autres s'occupant d'handicapés mentaux. Ça fait plaisir de voir que tout le monde n'a pas perdu l'esprit de noël!

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20 décembre 2010 1 20 /12 /décembre /2010 16:12

 

Un article intéressant de la RTBF qui vient en complément d'une question que je me suis posée récemment, à savoir existe-t-il encore une justice en Belgique. Question tout à fait légitime quand on voit le résultat de nombreux procès médiatisés de ces derniers temps, pratiquement tous étant entachés d'une manière ou d'une autre par d'honteuses décisions portant plus sur la forme des affaires que sur leur fond.

 

L'article en question concerne la publication d'un baromètre de confiance publié par le Conseil Supérieur de la Justice, et qui, par sondage, tente d'évaluer le point de vue du citoyen sur la Justice. Il apparaît que 60% des sondés disent avoir confiance en la justice, ce qui est à comparer avec la confiance accordée à l'enseignement (94%) et à la police (85%). Selon cet organisme, 60% serait un « bon niveau de confiance » de la part du citoyen. Personnellement, j'ai quelques doutes là-dessus, d'autant plus que ce taux de confiance diminue (il était de 66% il y a 3 ans), ce qui n'est pas étonnant au vu des derniers gros procès traités ces derniers mois. 60% de confiance peut paraître remarquable dans l'absolu, mais il faut se rappeler que l'on parle ici de la justice, probablement le pilier central de toute démocratie.

 

Ce que je note par exemple, c'est l'exceptionnelle confiance accordée à la police, qui elle est en hausse permanente depuis 2002. Ce qui me fait dire que le fossé se creuse, dans l'esprit des gens, entre les hommes de terrains qui sont sur le front et ceux « de l'arrière ». Et en effet, dans les diverses affaires que j'ai déjà abordées, on constate à chaque fois un remarquable travail de longue haleine de la part des policiers, travail immanquablement gâché par des procédures bureaucratiques. D'où une frustration bien compréhensible de la part de ces mêmes hommes de terrain qui ont parfois l'impression que l'on sabote leur boulot. J'appelle ça le triomphe de la bureaucratie sur la raison, où l'on a tendance à oublier qu'à la base l'administration est sensée servir dans un but pratique, et son application se doit justement d'être conditionnée en fonction de l'évolution des moyens disponibles et du but à atteindre. Et non l'inverse.

 

Ce que souligne le CSJ, c'est qu'un des gros points noirs de la justice belge est le temps incroyablement long des procédures, ce qui est dû bien souvent à un manque de moyen, qu'il s'agisse du nombre de magistrat ou des tribunaux vieillissants parfois mal adaptés (je pense entre autres au palais de justice de Bruxelles, magnifique bâtiments actuellement en restauration, et qui en pratique est une vraie passoire...). Il faut savoir qu'en Belgique, la plupart des peines de prisons de moins de trois ans ne sont pas affectées, simplement par manque de place dans les prisons. Il est clair qu'une personne condamnée et pourtant remise en liberté immédiatement génère un sentiment d'impunité... et encore une fois, un sentiment d'abandon ressenti par les policiers, dont le travail se retrouve de la sorte pratiquement nié.

 

On constate également de manière assez alarmante, la persistance d'une idée selon laquelle il y aurait une justice de classe, l'issue d'un procès étant conditionné pour 45% des belges au milieu social de la personne jugée. Là, c'est peut-être aller un peu loin. Ceci dit, on ne peut nier le fait qu'un avocat aux honoraires élevés est en général plus efficace qu'un commis d'office. Ceci dit, il ne s'agit pas là du fonctionnement de la justice en elle-même. Une autre explication serait que des individus issus de classes défavorisées sont plus souvent impliqués dans des affaires criminelles. S'il s'avère que c'est le cas, ça pourrait expliquer l'idée d'une justice « sociale. Mais il est difficile de se faire une idée précise là-dessus, les statistiques sur le sujet étant souvent mal vues, pour ne pas dire taboues. Qui plus est, il faudrait catégoriser les crimes: si on peut supposer qu'une personne pauvre sera plus facilement impliquées dans une affaire de vol, il n'en va pas de même des affaires de viol ou de corruption. Bref, difficile de trancher sur ce point, aussi je ne m'y risquerai pas.

 

A noter que pour temporiser ces chiffres qui peuvent être vus (à juste titre!) comme décevants, le CSJ les compare aux cotes de confiance par rapport à la presse (51%) et en l'Eglise (36%), et se réjouit de les battre à plate couture. Mais j'espère bien qu'elle les bat, encore heureux! Le contraire serait plus qu'inquiétant alors que la justice Joue un rôle central dans la société, plus important encore que celui de la presse! Et si la cote de l'Eglise est aussi basse, c'est en grande partie à cause du scandale des prêtres pédophiles en Belgique. Car avant cela, elle atteignait la note respectable de 54%, ce qui n'est plus si loin de celle de la Justice. Dernière comparaison, la confiance accordée au Parlement: 53%. Mais là encore, c'est à mettre en relation avec l'actualité: la Belgique est en crise politique grave depuis 6 mois (nous avons voté en juin mais n'avons toujours pas de gouvernement). Car avant cela, la confiance accordée au parlement étant de 77%, battant largement la Justice!

 

Bref, des chiffres bien plus révélateurs que ne veut bien l'admettre le Conseil, et en tout cas il n'y a pas vraiment de quoi se réjouir!

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17 décembre 2010 5 17 /12 /décembre /2010 21:20

 

Le 2 janvier 2010 se produisait le fait divers qui m'a sans doute le plus marqué en cette année. Il s'agit de l'assassinat de deux jeunes gens, Shana Appeltans, 18 ans, et son petit ami, Kévin Paulus, âgé lui de 22 ans. Les deux jeunes avaient passé la soirée dans un café, non loin du domicile des parents de Shana. Ils avaient ensuite pris la route en voiture pour rejoindre ce même domicile, qui se trouvait à peine à deux minutes de là. Plus tard, un passant allait remarquer le véhicule en feu sur le bord de la route. A l'intérieur, le corps des deux victimes, assassinées avec une arme à feu.

 

Ce crime m'avait particulièrement touché, car d'une part il était totalement gratuit (il ne s'agissait pas ici d'une agression qui aurait mal tourné), mais aussi et surtout les deux victimes étaient dans une situation dans laquelle j'aurais très bien pu être. Nombre de fois, je me suis retrouvé dans ma voiture avec mon ex-petite amie. Nous avions plus ou moins le même âge. Et Shana avait même un air de ressemblance assez troublant avec mon ex. Il s'agissait de deux jeunes, heureux, comme nous l'étions, et dont le seul tort aura été d'être restés seul quelques minutes dans une voiture. Quelques fatales minutes qui auront suffit pour leur faire croiser la route d'un tueur.

 

Car bien vite, il apparaitra dans l'enquête qu'ils ont été victime d'un tueur en série. Le voisin des parents de Shana, Ronald Jansen, sera confondu comme étant l'auteur de ces meurtres. Entre autres. Cet homme, connu dans la région du Limbourg pour être un professeur de 38 ans, bon vivant, comme l'attestent de nombreuses vidéos de lui lors de diverses fêtes locales, avait déjà été inquiété peu auparavant par la justice, dans le cadre d'une autre affaire. Plus précisément d'un autre assassinat, celui d'une jeune fille de 18 ans, Annick Van Uytsel, enlevée, séquestrée et tuée en avril 2007 et dont le vélo avait été retrouvé dans la propriété de Jansen.

 

L'auteur est passé aux aveux, et a également reconnu son implication dans d'autres affaires encore non résolues à ce jour, y compris de viol. Divers dossiers de disparitions datant des années 90 ont été rouverts suite à ses déclarations. Qu'en est-il, on ne le sait aujourd'hui, et les enquêtes promettent d'être longues.

 

Ce qui me fait parler de tout ça aujourd'hui, c'est un rapport qui vient d'être publié par l'inspection des services au sujet de l'enquête menée par la police concernant la disparition de Annick Van Uytsel. Ce rapport est accablant. Ronald Jansen était le principal suspect, pratiquement tout le désignant comme étant le coupable, à commencer bien sûr par le vélo de la victime retrouvé chez lui. Cependant, des informations capitales n'ont pas été transmises entre les divers services en charge de l'affaire. Résultat des courses, alors qu'il aurait dû être arrêté quelques jours avant ce fatidique 2 janvier 2010, il se trouvait toujours en liberté. Pour le plus grand malheur de Shana et Kévin.

 

Auraient-ils pu être sauvés? C'est possible, même si avec des si on met Paris en bouteille. Ou un tueur en prison... en tout cas, ces dysfonctionnements ne sont pas sans en rappeler d'autres, aux conséquences bien plus terribles encore; je pense là à l'affaire Dutroux, que j'ai déjà abordée. Là, la « guerre des polices » entre police et gendarmerie avait mené cette dernière à rater lamentablement une perquisition qui aurait pu mener à la libération de Julie et Mélissa.

 

Il est parfois dommage que l'histoire se répète, surtout lorsque l'on a clamé pendant des années que l'on avait tiré des leçons des erreurs du passé.

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13 décembre 2010 1 13 /12 /décembre /2010 17:54

 

Une différence notable entre les scènes politiques belge et française se situe au niveau du climat et de l'ambiance régnant entre les différents partis. En effet, en Belgique, on ne trouve pas le clivage « gauche-droite » comme c'est le cas en France, en tout cas pas de manière aussi marquée. Lorsqu'un Belge regarde une émission politique française, bien souvent il est frappé par les coups bas, les propos orduriers et les noms d'oiseaux que se jettent les opposants en guise d'argument et de débat. Cela ne veut pas dire que ces mêmes débats ne se résument qu'à ça et qu'il n'y a rien d'intéressant à en tirer, mais simplement qu'il est fréquent que l'ambiance générale ne soit pas des meilleures, voire que le climat soit carrément malsain.

 

Une explication à cette différence: en Belgique, les partis doivent composer entre eux après les élections pour composer un gouvernement majoritaire. On a ainsi pu voir au sein du même gouvernement des élus de droite et de gauche. Une complexité supplémentaire: on essaie que la couleur politique soit plus ou moins symétrique entre le nord et le sud, ce qui est difficile sachant que la Flandre est bien plus à droite que la Wallonie. Même s'il n'y a aucune obligation de ce coté, il est clair qu'il y a déjà suffisamment de différences entre les deux principales communauté sans aller en plus rajouter celle d'un gouvernement où le fossé communautaire serait doublé d'un fossé d'opinion politique. Ceci dit, encore une fois, il n'y a aucune règle formelle là-dessus.

 

L'exception à cette relative « bonne ambiance » a été la campagne pour les législatives de 2007, qui est restée dans les mémoires comme étant la campagne du non-respect (du moins pour la partie francophone du pays), et ce à cause d'un seul parti, le MR (de droite) et surtout de son président, monsieur Didier Reynders. Excellent économiste (malheureusement indispensable), il n'en est pas moins manipulateur et faux-cul. Au cours de cette campagne, il a réussit le tour de force de plomber l'ambiance par ses attaques répétées à l'égard des trois autres grands partis francophones (pour mémoire: le PS, Ecolo et le CDH -centriste-). Entre attaques ad-hominem et injures, ça ne volait pas haut... Ce qui encore une fois est assez rare. Quand on voit les 4 présidents de parti réunis, on a plus l'image d'une bande de vieux de la vieille qui se connaissent bien et d'une manière générale se respectent. Le symbole même de cela, c'est la traditionnelle remise de cadeaux: lors de la dernière grande soirée pré-électorale, après avoir croisé le fer pendant deux bonnes heures, les présidents se font des cadeaux les uns aux autres. Ce qui est bien sûr l'occasion de faire passer l'une ou l'autre remarque sous le couvert de l'humour, avec son lot de petites piques échangées toujours avec le sourire. Par exemple: une cravate bleue (couleur du MR) à monsieur di Rupo (président du PS, connu pour arborer toujours son célèbre nœud-papillon rouge), un livre « oui-oui » pour Joëlle Milquet (présidente du CDH, surnommée « madame non » par nos voisins flamands) ou encore une lampe se rechargeant grâce à une manivelle offerte à Jean-Michel Javaux (co-président d'Ecolo). Une sorte de surréalisme « à la belge » comme diraient certains, personnellement je préfère parler d'auto-dérision bien de chez nous.

 

Cependant, tout n'est pas toujours rose. Ainsi, la RTBF vient de publier un best-of des remarques assassines et autres vannes échangées cette année dans le cadre du parlement wallon. Je reproduis l'article dans sa totalité ici. Comme quoi, il n'y a pas qu'en France!

 

Le plus poète : Gilles Mouyard (MR)

Par SMS, à la présidente du Parlement wallon, Emily Hoyos (Ecolo): "C'est vrai que t'as un beau cul ...". Classe ! Quelques semaines plus tard, le même Mouyard s'interroge sur certains chiffres avancés par le gouvernement. Marcel Cheron (Ecolo) : "Mais vous êtes un littéraire !" Et paf ! Le ton est donné.

Le plus embarrassé : André Antoine (cdH)

S'adressant à Pierre-Yves Jeholet (MR), au nom du gouvernement : "Lorsque nous ne sommes pas là, vous le regrettez, et lorsque nous sommes là, vous voulez nous faire taire".

Le plus menaçant : Hervé Jamar (MR)

En séance plénière, à propos du ministre André Antoine (cdH) : "Je veux bien rester calme, mais il ne faut pas qu'il m'énerve non plus".

La plus nerveuse : Véronique Cornet (MR)

En commission, au ministre Benoît Lutgen (cdH) : "Vous avez intérêt à répondre à toutes mes questions, sinon je vais péter un câble".

Le plus volage : Marcel Cheron (Ecolo)

"La déclaration de politique régionale, c'est un contrat de travail, pas un contrat de mariage".

La plus frustrée : Monika Dethier (Ecolo)

Monika Dethier (Ecolo) par rapport à la coalition Olivier : "Je trouve que la complémentarité avec les libéraux eut été plus motivante, alors qu'avec le PS et le cdH, il y a des doublons".

Le plus philosophe : Jean-Claude Marcourt (PS)

S'adressant à Jean-Luc Crucke (MR) énervé : "Vous pouvez élever la voix, ça n'augmente pas la pertinence de votre propos".

Le plus empathique : Jean-Luc Crucke (MR)

Au ministre Jean-Marc Nollet (Ecolo): "Vous devez réparer dix ans d'indigence socialiste, et ce n'est pas facile, je vous le concède".

Le plus croyant : André Antoine (cdH)

Répondant à une question sur l'éventuelle "mort politique" de Michel Daerden (PS) : "Oh vous savez, pour moi qui suis chrétien pratiquant, on peut toujours ressusciter".

Le plus métaphorique : Willy Borsus (MR)

A propos de l'absentéisme: "Ce Parlement ressemble à une gare des bus à Charleroi un jour de grève des TEC". Réplique de la Présidente Emily Hoyos (Ecolo) : "Je peux vous assurer que la conductrice du bus est bien là".

La plus sentencieuse : Véronique Cornet (MR)

"Là où Michel Daerden passe, la loi sur les marchés publics trépasse".

Le plus incendiaire : André Bouchat (cdH)

A Hervé Jamar (MR), assis entre ses collègues réformateurs Jean-Paul Wahl (tendance Michel) et Pierre-Yves Jeholet (tendance Reynders) : "Tu me fais l'effet d'être assis entre deux feux ! ». Réplique de Jamar : "Chez nous au moins, il y a encore du feu !"

Le plus mêle-tout : Paul Magnette (PS)

Le ministre... fédéral n'a pas apprécié le "non" de Philippe Henry (Ecolo) à Citta Verde, méga-projet associant commerces et logements à Farciennes: "Je regrette ce traitement rapide avec des œillères idéologiques. C'est de l'amateurisme". Réaction de Jean-Marc Nollet (Ecolo, mêle-tout lui aussi pour l'occasion) : "L'arrogance est de retour. J'invite les ministres à plus de retenue par rapport à leurs collègues".

Le plus capricieux : Hugues Bayet (PS)

Le député-bourgmestre de Farciennes se réjouit de la création du zoning Ecopôle dans sa commune, mais ne digère pas l'échec de Citta Verde (cfr. supra): "Quoi, c'est Saint-Nicolas : parce qu'on a eu une Wii, on ne peut pas demander la Sega ?"

Le plus clair : Claude Eerdekens (PS)

"Le ministre Philippe Henry est un nul parmi les nuls. Il a la grande distinction de la nullité et de l'inefficacité".

Le plus brouillon : Claude Eerdekens (PS)

"Il m'est difficile de ne pas dire ce que je pense. Mais je pense qu'il n'est pas toujours bon que je dise ce que je dis".

Le plus incisif : Marcel Cheron (Ecolo)

"Claude Eerdekens est un bouffon, excessif et injurieux".

La plus indulgente : Monika Dethier (Ecolo)

A propos de Claude Eerdekens : "A la rigueur, il me fait pitié".

Le plus impatient : Maxime Prévot (cdH)

"J'ai envie de dire que le ministre Henry se hâte un peu lentement".

La plus compatissante : Christine Defraigne (MR)

A propos du ministre Philippe Henry (Ecolo) : "Je trouve qu'il est d'une naïveté incroyable. Il croit encore au Père Noël. C'est un type charmant, pondéré et modéré, mais on est tenté de se demander s'il est vraiment à sa place".

Le plus déçu : Bernard Wesphael (Ecolo)

A propos du PS liégeois : "Je constate que le parti dominant revient en arrière. Il suffit de voir la violence de certaines déclarations de leaders socialistes pour se rendre compte que c'est le retour de l'arrogance"

Le plus fataliste : Richard Miller (MR)

A Rudy Demotte : "Vous (le PS) êtes là depuis 40 ans, et vous osez nous dire aujourd'hui qu'il n'y a pas d'identité wallonne ! Avec vous, les Wallons sont fondamentalement cocus !"

Le plus mauvais pronostiqueur : Serge Kubla (MR)

Suite au passage de Laurent Louis des rangs du MR à ceux du Parti Populaire: "Si on veut parler de folklore, on y est. C'est vraiment une étoile filante qui n'a pas brillé dans le firmament politique". Depuis, Laurent Louis est devenu député fédéral...

Le plus psychiatre : Bernard Wesphael (Ecolo)

A l'adresse de Dimitri Fourny (cdH) : "Vous êtes un menteur. Je m'inquiète pour vos problèmes de santé mentale".

Le plus pressé : Willy Borsus (MR)

"Très souvent dans cette assemblée, le temps qu'on consacre à débattre de l'opportunité d'avoir le débat, on l'aurait déjà quasiment mené".

Les plus ébahis : Willy Borsus (MR) et Paul Furlan (PS)

Dialogue de sourds entre le chef de groupe de l'opposition: "Vous dites blanc le matin, noir l'après-midi, et vous vous étonnez qu'on s'étonne !",

et le ministre: "Vous dites n'importe quoi le matin, n'importe quoi l'après-midi, et vous vous étonnez que je me fâche !"

Le plus trublion : Jean-Luc Crucke (MR)

Au sujet du plan de simplification administrative pour les entreprises du ministre-président Rudy Demotte (PS) : "Ceux qui croient le moins à votre plan se trouvent dans votre majorité".

Le plus "fan":  Jean-Luc Crucke (MR)

"André Antoine a une mauvaise foi pas possible, mais aussi un talent et un humour incroyables pour nous faire avaler ses couleuvres".

Le plus alchimiste : Paul Furlan (PS)

Sur sa volonté de faire aboutir le décret portant sur le décumul des mandats: "Avec du temps, on transforme bien de l'herbe en lait".

La plus patronne  : Emily Hoyos (Ecolo)

"Je ne suis pas là pour beurrer les sandwiches"

Le plus généreux: Dimitri Fourny (cdH)

Sur le même sujet : "Les Ecolos voulaient une sucette ? Ils l'ont !"

La plus gourmet : Véronique Cornet (MR)

Concernant le même décret : "C'est le nonosse qu'on donne à Ecolo".

Le plus réaliste : Maxime Prévot (cdH)

Toujours à propos du décumul : "Nous nous autorisons à ne pas considérer qu'il faille clamer que la Wallonie est devenue la terre promise de la bonne gouvernance mondiale suite à l'adoption future de ce texte".

Le plus moralisateur : Paul Furlan (PS)

Répondant à Hervé Jamar (MR) sur la bonne gouvernance au niveau local : "C'est un sujet qui appelle modération et sagesse, et on sait que ce n'est pas votre principale qualité".

Et dire que ceci n'est qu'un petit aperçu, loin d'être exhaustif ...

Amabilités compilées par Rudy Hermans

crédit: RTBF info.

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10 décembre 2010 5 10 /12 /décembre /2010 22:59

 

On peut vraiment se poser la question. En effet, depuis un certain temps, il apparaît nettement que chaque affaire judiciaire importante se trouve entachée de l'une ou l'autre erreur, souvent un vice de forme/de procédure, menant à un jugement bâclé quand il n'est pas tout simplement annulé. D'où on s'en doute un profond sentiment d'injustice de la part des victimes. Dernière en date, et non la moindre, la décision en ce jour de la cours d'appel de considérer les preuves dans le dossier KB Lux comme étant non-recevables. L'occasion pour moi de revenir brièvement sur une liste commençant à devenir longue de procès-fleuves aux résultats perçus comme étant honteux.

 

L'affaire KB Lux (du nom d'une ancienne banque), qui a défrayé la chronique milieu des années 90, concerne ce qui reste à ce jour comme étant la plus grande fraude ayant eu lieu en Belgique. Les anciens dirigeants de la banque sont soupçonnés d'avoir aidé certains de leurs gros clients à échapper au fisc, entraînant ainsi un manque à gagner pour l'état belge estimé à 400 million d'euros. La cours d'appel a confirmé le jugement qui est tombé en première instance et qui avait estimé que les preuves étaient non-recevables, le juge d'instruction et le parquet étant au passage accusés d'avoir manipulé leur enquête notamment en taisant divers procès-verbaux. Qu'en est-il réellement, je suppose qu'on ne le saura jamais. Mais nul doute que pas mal de gens doutent aujourd'hui de cette version des faits. Et ce d'autant plus que, pour beaucoup, il ne s'agit que d'une affaire de plus où le puissant s'en tire face aux plus faibles.

 

Dans le genre jugement honteux, il y a eu il y a quelques mois celui concernant la catastrophe de Ghislenghien. Pour mémoire, le 30 juillet 2004, lors de la construction d'une usine sur le zoning industriel de Ghislenghien, un engin de chantier avait percé une conduite de gaz à haute pression gérée par la société Fluxys. Les secours (policiers et pompiers) venaient à peine d'arriver sur place lorsqu'une explosion catastrophique, de la puissance d'une petite tête nucléaire, s'est produite. Le bilan fut terrible: 24 morts et plus de 130 blessés. L'une des causes de la catastrophe a été manifestement la méconnaissance des lieux des travaux. Les ouvriers du chantier de construction ignoraient par exemple à quelle profondeur se trouvait cette conduite de gaz. La faute à qui? Probablement des erreurs de procédure et des négligences diverses, et ce ne sont pas les responsables potentiels qui manquent. S'agit-il d'une mauvaise communication de la part de Fluxys concernant sa conduite, ou d'une erreur au niveau de l'administration communale d'Ath, commune sur le territoire de laquelle s'est produite la catastrophe? Ou alors, sont-ce les gens directement impliqués dans le chantier qui ont insuffisamment sécurisé celui-ci? Il faut savoir, entre parenthèse, que les cartographies concernant les grosses conduites de gaz sont plus que partielles en Belgique. J'ignore les détails précis, mais les exigences en matière de sécurité sont risibles (ce qui a fait scandale à l'époque), bien qu'elles sont sensées avoir été améliorées depuis. Ceci dit, pas mal d'incidents récents ont prouvé qu'il n'en était rien et qu'il y a toujours une série de grosses lacunes de ce coté. Toujours est-il que le tribunal a estimé lors du procès que seuls trois des quatorze prévenus ont été responsables: la société menant les travaux, l'architecte responsable du chantier et le conducteur de travaux. Bref, uniquement des « petits ». Fluxys, la commune d'Ath et les autres ont été relaxés, au grand dam des parties civiles... et d'une bonne partie de la population. En effet, peut-on vraiment reconnaître 2 personnes physiques et une morale comme étant responsable de ce drame, sachant qu'il y avait manifestement d'énorme lacunes à l'échelle des organismes fédéraux sensés s'occuper de ce genre d'affaire? Le procès en appel vient de débuter, mais il tourne déjà à la farce; en effet l'avocat d'un des prévenus a déjà tenté de révoquer le juge sous prétexte d'une soit-disant partialité de celui-ci, tandis qu'il apparaît qu'un des experts mandaté par la justice pour étudier le dossier est un ancien consultant... de Fluxys. Bref, encore une fois, un sentiment de dégoût assez généralisé. Les victimes n'y croient plus, et je ne pense pas me tromper en affirmant qu'il en est de même pour une bonne part de la population belge.

Un dernier point est à noter sur cette affaire: il est apparut lors de la catastrophe que les pompiers (lourdement touchés ce jour-là, 5 d'entre eux ayant été tués) manquaient de moyen, avec une grande disparité entre Wallonie et Flandre (à l'avantage de cette dernière). A cette occasion, on a estimé qu'il leur fallait au moins 70 millions pour rénover l'ensemble du service. Il leur en a été accordé à peine 2, soit tout juste de quoi acheter trois camions-échelles. Malheureusement, 6 ans après, rien n'a changé, et il ne se passe pas un mois sans que l'on mette en lumière le manque de moyen des pompiers belges, ou le manque de sécurité dans le domaine du gaz en Belgique. D'où l'impression désagréable que 24 personnes sont mortes en vain.

 

Il y a environ un an survenait un autre scandale, lié cette fois aux ingérences de l'Europe et des Droits de l'homme dans les affaires judiciaires « locales ». Il s'est agit du procès de Marcel Habran, l'un des plus dangereux malfrats de la région de Liège, poursuivi pour l'attaque du fourgon de Waremme en 1998, au cours de laquelle deux convoyeurs de la Brinks ont été tué, et un autre sérieusement blessé. L'attaque a été particulièrement violente, avec 68 impacts de balle relevés, ce qui correspond à plus de deux chargeurs d'AK-47, soit un tir interminable de plus de 7 secondes, destiné à tuer. Habran a été reconnu coupable lors de son procès, mais le jugement a été cassé par la cours Européenne de justice, sous prétexte que la décision du jury n'a pas été motivée. En clair, les jurés ont répondu aux questions qui leur était posées, mais n'ont pas expliqué pourquoi ils avaient répondu par l'affirmative ou la négative, ce qui est exigé par l'Europe depuis peu. Bref, bien qu'Habran soit coupable sans l'ombre d'un doute, le procès a été cassé pour une simple question de procédure, par une instance externe à l'état s'ingérant dans des affaires purement belges dans le but de faire respecter les droits de l'homme. On se demande bien quelle considération cette « noble » instance a pour les familles des victimes. Où sont leurs droits? Est-ce respectueux de leur faire revivre encore une fois la terrible épreuve d'un procès et d'un face-à-face avec leur bourreau? En attendant, on a dû recommencer le procès (pour en arriver au même verdict de culpabilité d'Habran et de ses complices), alors que le premier avait déjà duré pas loin de 6 mois et coûté au passage une petite fortune au contribuable.

 

La plus récente des affaires du genre (bien que le scandale ait été moins important) a été la libération anticipée de deux « présumés » terroristes islamistes, juste après leur arrestation. La police a mené une enquête de plus de trois ans, avec notamment l'infiltration au sein du groupe terroriste d'un policier, au péril de sa vie on s'en doute. Durant l'enquête, on a également procédé à des écoutes téléphoniques ainsi qu'à la pose de micro dans la voiture de l'un des suspects. La culpabilité de ces gens est certaine, de même que leur dangerosité pour l'ensemble de la société. Mais malheureusement, ces méthodes d'investigation sont fortement réglementées, et il est quasi-sûr qu'une enquête aussi longue ne se déroule pas sans l'une ou l'autre entorse à la procédure. C'est ainsi que le travail remarquable et dangereux de la police a été réduit à néant, à l'instant même où le piège se refermait sur de dangereux criminels, qui pourront poursuivre leurs activités sans être inquiétés, à l'heure ou il apparaît de plus en plus clairement que la Belgique est un foyer de l'islamisme radical en Europe. Encore une fois pour une simple question de procédure, autrement dit une logique bureaucratique dont on sait à quel point elle peut justement être tout sauf logique.

 

Ce ne sont là que quelques exemples parmi d'autres (on pourrait citer les scandales pédophiles liés à l'Eglise), et ils sont nombreux, dans des affaires plus ou moins graves. Et ça ne tombe pas au bon moment. Dans un contexte de crise sociale générant des inégalités, alors même que le pays est virtuellement sans gouvernement depuis 6 mois et que les problèmes semblent s'accumuler, provoquant au passage la lassitude bien compréhensible de la population, avoir en plus l'impression que ce sont toujours les mêmes qui trinquent ne peut engendrer à court et moyen terme qu'une grande frustration. Laquelle favorise la monté des extrêmes. Et si face à ces tensions le rempart inviolable et sacré que représente la justice fini à son tour par s'écrouler, du moins en apparence, alors que nous reste-t-il comme garant? Bien peu de chose. Une certitude: la lassitude actuelle n'est pas inédite en Belgique. Il y a 15 ans déjà, on ressentait la même incompréhension et l'on était alors tout aussi désabusé. Le contexte? L'affaire Dutroux. D'aucun se demandent aujourd'hui si les choses ont vraiment changé depuis. J'ose le croire, mais ce n'est pas si évident. Et ces incertitudes peuvent facilement apporter de l'eau au moulin aux démagos et aux populistes (encore eux!) de tout bord; il ne faut pas s'étonner en effet si un Modrikamen rencontre un certain succès lorsqu'il se dit victime d'un complot de la part du pouvoir judiciaire belge, manipulé selon lui par le gouvernement. Comment les gens pourraient-ils se convaincre du contraire alors que les procédures bureaucratiques en tout genre apportent presque quotidiennement leur lot de dysfonctionnements en divers menant à des décisions de justice aberrantes allant contre tout bon sens? Il y a là à n'en point douter un problème grave.

 

Ce n'est qu'une composante parmi d'autres, mais malheureusement la somme de tous ces dysfonctionnements, qu'ils soient judiciaires, gouvernementaux ou de manière générale de société n'augure rien de bon. On sait à quoi cela peut nous mener, et peut-être est-il temps d'agir avant qu'il ne soit trop tard.

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30 novembre 2010 2 30 /11 /novembre /2010 17:57

 

Encore une fois, comme quoi l'adage selon lequel ce sont ceux qui parlent le plus qui en font le moins n'est peut-être pas infondé après tout.

 

Toujours est-il qu'avant-hier, la RTBF a diffusé une émission au nom évocateur de « Belgique, où vas-tu? », comprenant un débat entre représentants de divers partis politiques. Honnêtement, je ne l'ai pas regardée, parce que je n'avais pas le temps, ou peut-être pas l'envie. Peu importe car si cela signifie que je ne peux pas en commenter le contenu ce n'est de toute façon pas mon but ici. Non, je vais plutôt parler encore une fois du Parti Populaire, lequel n'était pas invité, mais qui n'en rate cependant pas une pour se mettre en avant.

 

Et justement, c'est au sujet de cette absence d'invitation que le PP, en la personne de son président, l'ouvre une fois de plus. En effet, ledit président, le trop célèbre Modrikamen, accuse, une fois n'est pas coutume, la RTBF de partialité, et parle même de violation du règlement d'ordre intérieur concernant les médias publics. Et oui, une fois de plus... « de plus » car j'avais déjà signalé que le parti avait pour coutume d'attaquer tout opposant, n'hésitant pas à porter des accusations graves, notamment à l'égard de la justice qualifiée quant à elle « d'instrumentalisée », rien que ça. Et dès lors que l'on ne leur accorde pas l'importance qu'ils s'imaginent avoir, c'est forcément qu'il y a complot contre eux, rhétorique habituelle pour un parti populiste. On n'est donc pas surpris à ce niveau.

 

Non, là où se situe la surprise, c'est plutôt concernant l'élément permettant au PP de justifier sa présence dans une telle émission, à savoir qu'il serait le pendant francophone de la N-VA. Pour mémoire, le parti N-VA (pour Nieuw Vlaamse Alliantie), n'est autre qu'un parti nationaliste flamand (malheureusement la première formation politique au nord du pays depuis les dernières élections) proche des milieux d'extrême-droite, et responsable en grande partie de la crise actuelle, en refusant toute forme de négociation équilibrée. Son président, Bart De Wever, est un dangereux démago, reconnu dans une bonne partie de l'Europe comme étant un manipulateur. Il est entre autre connu pour des déclarations révisionnistes, voire négationnistes, concernant l'histoire de la Belgique en particulier. Ce serait un coup bas de ma part de signaler que son père était un collabo, car Bart n'en est en rien responsable et ceci pouvant être un pur hasard, cependant sur ce dernier point je ne lui laisserais pas trop le bénéfice du doute.

 

Et c'est à cela que Modrikamen se compare? Je ne vois là qu'une seule explication: étourdi et ébloui par l'ascension fulgurante du premier parti flamand (créé en 2001 et d'importance quasi négligeable jusqu'en 2007), il s'imagine qu'en se prétendant son égal, le succès suivra. Il n'a sans doute pas remarqué un détail: Bart De Wever est un homme extrêmement intelligent, manipulateur hors-pair, bon en rhétorique et excellent comédien... là où Modrikamen et sa clique ne forment qu'une pâle caricature de parti sentant le populisme à 1 000 lieues. Ultime ironie: jusqu'à il y a peu, le parti prétendait remettre l'Etat belge au centre, renforcer son importance et créer presque de toute pièce un grand mouvement nationaliste belge unissant en son sein Flamands, Wallons et Bruxellois. Aujourd'hui, petit changement: le PP se déclare pour un modèle confédéral: autrement dit ce que veulent les nationalistes flamands à savoir un modèle dans lequel l'état fédéral est vidé de sa substance, allouant pratiquement toutes les compétences, depuis l'enseignement jusqu'à la politique sociale en passant par la justice, aux entités fédérées. Bref un système générant une concurrence énorme entre les régions (comme on le voit en Allemagne) assortie à un alourdissement bureaucratique là où l'on espère sur le papier des simplifications. En somme, un appauvrissement général pour l'ensemble des citoyens belges, largement à l'opposé de ce que prônait encore Modrikamen il y a quelques semaines à peine. L'important n'est pas ici la critique que je peux faire du confédéralisme, mais bien le total retournement de situation dans le discours du PP.

 

Du coté de la RTBF, on justifie l'absence d'invitation au PP par des choix éditoriaux. Il est clair que si l'on doit commencer à inviter le moindre parti insignifiant, on se retrouvera bientôt avec le Front National, la Ligue Communiste Révolutionnaire, le Parti du Travail de Belgique, le Rassemblement Wallonie-France, le Vivant,... et encore je ne parle là que des partis francophones minoritaires que je connais. On se doute bien qu'il est impossible de les représenter, ce d'autant plus qu'eux-mêmes ne représentent pour ainsi dire personne.

 

Bref, encore du vent et de la « grande gueule » de la part du PP. Ce qui est plus qu'intéressant de noter, c'est le discours encore une fois caricatural: attaque de la RTBF d'une part, et retournement de veste d'autre part faisant d'eux « le seul parti francophone proche de la N-VA ». J'en rigole encore, et j'ai l'impression qu'avec eux ce n'est pas fini!

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17 novembre 2010 3 17 /11 /novembre /2010 22:08

 

Hasard du calendrier? Alors que j'en parlais hier, voilà que le Parti Populaire refait surface aujourd'hui, en la personne de son seul élu, Laurent Louis.

 

Comme précédemment expliqué, le gars en question a déjà fait parler de lui cet été en commentant la politique du président Nicolas Sarkozy au sujet de l'expulsion des Roms, justifiant celle-ci (sur son profil facebook) par le fait, je cite que « ces gens occupent des terrains illégalement, ne travaillent pas, n'ont aucune ressource financière et on voudrait nous faire croire qu'ils vivent d'amour et d'eau fraiche... Il est évident qu'ils doivent voler ou faire des trafics pour subsister. ».

 

Aujourd'hui il récidive dans la provocation, à nouveau via facebook, en proposant d'instaurer un permis à points. Petite particularité, il ne s'agit pas du permis de conduire... mais du permis de séjour! Et oui, vous avez bien compris! En gros, un immigré serait pourvu d'une sorte de « réserve » de fautes permises et dans laquelle il piochera à chaque « erreur ». Une fois son stock épuisé, il perdrait tout simplement sa nationalité belge. Simple comme bonjour! Et moi qui disait que le PP n'inventait rien, me voilà surpris! Ou comment régler le problème de l'immigration en trois coups de cuillère à pot.

 

A force de vouloir se prendre pour Sarkozy, il finit par copier ses pires défauts, sans avoir cependant le dixième de ses qualités au premier rang desquelles l'intelligence. Par contre, il faut reconnaître qu'il a très bien compris comment attirer l'attention sur lui: à défaut de proposer des initiatives intelligentes, provoquer, en simplifiant au passage des situations extrêmement complexe comme le fait l'ensemble de son parti, Modrikamen en tête, lequel soutient la proposition de son élu, selon ce dernier. A moins bien entendu que ce ne soit pas pour attirer l'attention sur lui, mais tout simplement parce qu'il s'agit de l'expression de ses sentiments profonds. Ou probablement un peu des deux.

 

Evidemment, les réactions n'ont pas tardé, avec une demande d'analyse de ces propos par le centre pour l'égalité des chances, demande émanant... de Rudy Aernoudt, co-fondateur du parti récemment exclu, et qui depuis n'en rate pas une pour critiquer ceux qui n'étaient autre que ses bons amis il y a quelques mois à peine. Tiens donc, un démago de plus, mais qui s'en étonnera?

 

Quoi qu'il en soit, le parti a au moins le mérite de nous distraire, à défaut d'autre chose. Mais c'est tout ce que l'on peut en attendre je crois.

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